Banjul, Gambie — En déplacement en Gambie, le député sénégalais, de la sixième législature du parlement de la CEDEAO, Abdoulaye Vilane s’est exprimé sans détour sur la situation géopolitique particulièrement instable que traverse l’Afrique de l’Ouest. Dans un contexte marqué par les retraits fracassants du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la CEDEAO, l’élu socialiste livre une analyse à la fois critique et constructive, appelant à une profonde refondation des mécanismes d’intégration régionale.
« Le monde traverse une crise comparable à un conflit global », a déclaré M. Vilane, soulignant l’interconnexion des défis actuels : « Nos États font face à des défis économiques, sociaux, et technologiques exacerbés par la mondialisation et les usages incontrôlés des réseaux sociaux. » Ces tensions, estime-t-il, ne sont pas propres à la région mais s’inscrivent dans une dynamique mondiale de remise en question des institutions traditionnelles.
Le retrait des trois pays sahéliens de la CEDEAO constitue pour lui un symptôme plus qu’une cause : « Il y a une indigence de la classe politique. Une incapacité à se hisser à la hauteur des aspirations populaires. C’est ce qui ouvre la voie aux ruptures, parfois brutales. » Une déclaration qui sonne comme un appel à l’autocritique au sein des élites politiques ouest-africaines.
Malgré ce constat sévère, Abdoulaye Vilane reste attaché à l’idéal d’une Afrique intégrée et solidaire. Pour lui, il est urgent de « réinventer » la CEDEAO. « Il faut que la CEDEAO aille vers plus de démocratie, plus de solidarité, plus d’écoute. Il faut une volonté politique réelle », plaide-t-il, prônant une vision centrée sur les peuples et non uniquement sur les États.
Membre influent des instances parlementaires régionales depuis plusieurs années, Vilane affirme tirer de cette expérience « une richesse humaine et politique immense ». À 57 ans, il se dit prêt à transmettre le flambeau à la jeunesse, dans un esprit de continuité et de service : « J’ai appris à être plus humble, à écouter, à dialoguer. Mon souhait, c’est de passer le témoin dans la sérénité, tout en restant disponible pour servir. »
Interrogé sur ses ambitions au sein du Parti socialiste sénégalais, dont il est le porte parole et l’un des visages emblématiques, il reste mesuré, mais déterminé : « Si je dois diriger un jour, ce sera avec l’accord de mes camarades, dans un esprit de rassemblement. Il faut tourner la page des divisions et redonner de l’élan à notre famille politique. »
Dans un moment critique pour la région, les propos d’Abdoulaye Vilane résonnent comme un appel à la lucidité et à la responsabilité. Il invite à un dialogue intergénérationnel, à une gouvernance à l’écoute, et à une solidarité régionale repensée. Un message d’autant plus pertinent que l’Afrique de l’Ouest entre dans une période charnière de son histoire politique.