Abuja, 10 décembre 2025 – La délégation sénégalaise au Parlement de la CEDEAO a présenté un rapport complet sur la situation de la gouvernance, de l’État de droit et de la justice au Sénégal. La présentation, assurée par les députés Guy Marius Sagna, Fatou Ba, Ismaïla Mamadou Abdoul Wone, Fatma Guèye, Amdiatta Diaby et Mamadou Mory Diaw, a mis en lumière à la fois les progrès réalisés et les défis majeurs auxquels le pays est confronté.
Un cadre institutionnel solide mais une application inégale
Le rapport souligne que le Sénégal dispose d’un socle institutionnel qui favorise la bonne gouvernance. Parmi les principaux instruments cités :
- La Stratégie nationale de bonne gouvernance (SNBG), en vigueur depuis 2013.
- La loi sur l’accès à l’information et la loi sur la déclaration de patrimoine, récemment adoptées.
- Des institutions de contrôle telles que la Cour des comptes, l’Inspection générale d’État et le Médiateur de la République.
Grâce à ces dispositifs, le Sénégal figure parmi les pays les mieux classés du continent en matière de gouvernance selon l’Indice Mo Ibrahim.
Cependant, la délégation note que la transparence reste insuffisante, que la lutte contre la corruption progresse lentement et que la politisation de l’administration continue d’affecter la performance publique.
Recommandations pour renforcer l’État de droit
Pour améliorer la gouvernance, le rapport préconise :
- Une indépendance renforcée de la justice.
- Une meilleure transparence budgétaire.
- L’application stricte des lois sur l’information et la déclaration de patrimoine.
- Une participation citoyenne plus large, notamment pour les femmes et les groupes vulnérables.
- Un contrôle administratif plus efficace.
- Une intensification de l’éducation civique.
La délégation insiste sur la nécessité d’appliquer rigoureusement les réformes afin de restaurer la confiance des citoyens.
Une situation carcérale jugée préoccupante
Le rapport fait état d’une surpopulation carcérale critique :
- 15 267 détenus en août 2025, pour moins de 5 000 places disponibles.
- Un taux d’occupation dépassant 250 % dans plusieurs établissements.
- Plus de 547 personnes en détention provisoire depuis plus de trois ans.
Ces conditions affectent l’alimentation, l’hygiène, l’accès aux soins et la sécurité des détenus. La situation a été décrite par des experts internationaux comme un risque majeur pour les droits humains.
Mesures recommandées
Le rapport propose :
- La construction ou réhabilitation de prisons.
- Le recours accru aux peines alternatives (travaux d’intérêt général, bracelet électronique).
- La réduction des délais judiciaires.
- Le renforcement des moyens humains et matériels dans les établissements.
- La mise en place d’un suivi indépendant des conditions de détention.
Accès à la justice : des avancées mais encore des obstacles
Le Sénégal dispose d’un cadre juridique complet avec différents niveaux de juridictions et des dispositifs comme les Maisons de justice, qui permettent de régler rapidement et gratuitement certains conflits.
L’État finance également un Fonds d’aide juridictionnelle, mais son budget reste insuffisant pour couvrir tous les besoins.
Les principaux obstacles identifiés sont :
- L’éloignement de certaines juridictions dans les zones rurales.
- Le coût et la lenteur des procédures.
- Le manque de magistrats et de personnel dans plusieurs régions.
- Une faible connaissance du droit par une partie de la population.
Des réformes sont en cours, notamment la digitalisation des services judiciaires (e-justice), l’ouverture de nouvelles Maisons de justice et le recrutement de magistrats supplémentaires.
Un rapport présenté avec transparence
La délégation sénégalaise a souligné que ce rapport s’inscrit dans une démarche de transparence, conformément aux orientations des nouvelles autorités. Le document met en avant les acquis mais expose aussi clairement les difficultés, afin de favoriser des réformes plus efficaces.