Dans un discours prévu à la nation ce samedi, le Président Macky Sall a abordé la situation délicate qui prévaut au Sénégal à l’approche de l’élection présidentielle du 25 février 2024. Un différend entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel a éclaté, mettant en lumière une prétendue affaire de corruption de juges.
Face à cette crise, l’Assemblée nationale a pris l’initiative de créer une Commission d’enquête parlementaire, par Résolution en date du 31 janvier 2024, afin d’examiner le processus de vérification des candidatures et d’enquêter sur toute autre question liée. à l’élection présidentielle.
Dans une réponse conjointe datée du 29 janvier 2024, le Conseil constitutionnel a rejeté les allégations portées contre lui, soulignant la gravité des accusations et insistant sur la nécessité d’une enquête respectant les procédures constitutionnelles et légales.
L’ajout d’une polémique concernant un candidat à la double nationalité, après la publication de la liste définitive découverte des candidats, vient encore compliquer la situation. Une violation apparente de l’article 28 de la Constitution, qui stipule que tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, soulève des questions sur la crédibilité du scrutin.
Le président Sall a souligné la gravité de cette situation complexe, mettant en garde contre les risques potentiels d’un contentieux pré et postélectoral, rappelant les séquelles des manifestations violentes de 2021 et 2023. Il a affirmé que le pays ne peut se permettre une nouvelle crise.
Le Président a souligné son rôle de garant du fonctionnement régulier des institutions et a insisté sur le respect de la séparation des pouvoirs, refusant d’intervenir dans le conflit entre les pouvoirs législatifs et judiciaires.
Face à cette impasse, l’Assemblée nationale a soumis au Président une proposition de loi constitutionnelle en procédure d’urgence, portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution. Après consultation des principales parties, le président Macky Sall a signé le décret n° 2024-106 du 3 février 2024 abrogeant le décret n° 2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral.
Le Président Sall a réaffirmé son engagement à ne pas se présenter à l’élection présidentielle, soulignant son désir de préserver la stabilité et la démocratie au Sénégal. Il a annoncé son intention de lancer un dialogue national ouvert pour créer les conditions d’une élection libre, transparente et inclusive, dans un Sénégal apaisé et réconcilié.
Alors que le pays fait face à des défis cruciaux, la manière dont la crise actuelle sera résolue pourrait déterminer le cours futur de la démocratie au Sénégal.
Voici l’intégralité du discours du Président Macky Sall
Mes chers compatriotes,
Alors que s’annonce l’élection présidentielle du 25 février 2024, notre pays est confronté, depuis quelques jours, à un différend entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, en conflit ouvert sur fond d’une supposée affaire de corruption de juges.
Ainsi, l’Assemblée, se fondant sur ses prérogatives, a décidé, par Résolution en date du 31 janvier 2024, de mettre en place une Commission d’enquête parlementaire pour éclairer sur le processus de vérification des candidatures et sur tout autre fait se rapportant à l’élection.
Dans son communiqué du 29 janvier 2024 signé par tous ses membres, le Conseil constitutionnel a réfuté les allégations portées contre lui, tout en prenant la mesure de la gravité des accusations, et en tenant à ce que toute la lumière soit faite dans le respect des procédures constitutionnelles et légales régissant les relations entre les institutions, notamment la séparation des pouvoirs et le statut de ses membres.
A cette situation suffisamment grave et confuse, est venue s’ajouter la polémique sur une candidate dont la bi-nationalité a été découverte après la publication de la liste définitive des candidats par le Conseil constitutionnel ; ce qui constitue une violation de l’article 28 de la Constitution qui dispose que « tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise ».
Ces conditions troubles pourraient gravement nuire à la crédibilité du scrutin en installant les germes d’un contentieux pré et postélectoral.
Alors qu’il porte encore les stigmates des violentes manifestations de mars 2021 et de juin 2023, notre pays ne peut pas se permettre une nouvelle crise.
J’ajoute qu’en ma qualité de Président de la République, garant du fonctionnement régulier des Institutions, et respectueux de la séparation des pouvoirs, je ne saurais intervenir dans le conflit opposant le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire.
Devant cette situation, l’Assemblée nationale, agissant en vertu de ses prérogatives, m’a saisi, pour avis, conformément à son règlement intérieur, d’une proposition de loi constitutionnelle en procédure d’urgence portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution.
J’ai pris acte de cette saisine après avoir consulté le Président de l’Assemblée nationale, le Premier ministre, le Président du Haut Conseil des collectivités territoriales, le Président du Conseil économique, social et environnemental et le Président du Conseil constitutionnel.
En conséquence, compte tenu des délibérations en cours à l’Assemblée nationale réunie en procédure d’urgence, et sans préjuger du vote des députés, j’ai signé le décret n° 2024-106 du 3 février 2024 abrogeant le décret n° 2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral.
Pour ma part, mon engagement solennel à ne pas me présenter à l’élection présidentielle reste inchangé.
Enfin, j’engagerai un dialogue national ouvert, afin de réunir les conditions d’une élection libre, transparente et inclusive dans un Sénégal apaisé et réconcilié. Vive le Sénégal ! Vive la République !